11/07/2013

Mon intervention, au nom du groupe PSEA, lors du débat Lyon-Turin.










Monsieur le Président,
Madame la Vice-présidente,
Messieurs les représentants de la Conférence intergouvernementale pour le Lyon-Turin,
Messieurs les représentants des maîtres d’ouvrages,
Cher(e) s collègues,

Après l’intervention de Claire DONZEL qui a appréhendé le projet dans sa dimension européenne et au regard de son importante pour l’aménagement du territoire en Europe et en Rhône-Alpes, je vais m’exprimer en apportant une lecture plus locale du projet et de ses enjeux .

Si le projet de liaison ferroviaire Lyon Turin est bien un projet à dimension européenne dont les enjeux dépassent de très loin nos seuls territoires, et parfois même la Région Rhône-Alpes, je souhaite rappeler qu’il émerge également de préoccupations locales. Car, à travers cette infrastructure, il s’agit de répondre à certaines préoccupations et aux attentes des populations alpines   

Sécuriser le transport ferroviaire fret sur nos territoires, c’est le premier enjeu local que j’identifie.

Le Lyon-Turin et ses différents itinéraires d’accès, permettront de lever enfin l’obstacle des 43 kilomètres de voie unique entre Saint-André-le-Gaz et Chambéry, il s’agira d’améliorer la déserte ferroviaire de l’Est de la Région qui date pour l’essentiel du XIX siècle et qui est aujourd’hui portée à saturation. Tout le monde s’accorde sur ce constat. Tout le trafic fret est acheminé sur la ligne le long du lac du Bourget, et traverse les agglomérations d’Aix-les-Bains, de Chambéry, la Combe de Savoie, Montmélian, la plupart des chefs lieux de canton de la vallée de la maurienne. Bref, Pour être plus concret, on peut se dire que près de 100 000 personnes entendent le train de marchandises qui part de Modane à 23 h et passe à proximité d’Aix les bains à 1h du matin. Parce que c’est aussi cela la réalité  du fret ferroviaire actuel et malgré les récents travaux de modernisation de la ligne historique, le bruit, les nuisances sont bien présents. Ces nuisances, nous les supportions de bon cœur quand la grande entreprise nationale qu’est la sncf embauchait encore près de 800 cheminots dédiés à l’exploitation, à l’entretien, à la maintenance de cette ligne. Nous avons malheureusement compris que ce ne sera plus jamais le cas.
A cela ; on peut également ajouter la difficulté physique du franchissement des alpes par la voie historique de Culoz à Modane, dite voie de la Maurienne, avec ses pentes à plus de 30 pour mille, et la nécessité de doubler les locomotives sur les trains de fret, trop lourd, en particulier sur le dernier tronçon entre St Michel de Mne et Modane.    
Mes chers collègues, on peut être un fervent défenseur du transport ferroviaire, comme je le suis, et convenir qu’on ne peut plus travailler comme au début du siècle dernier. J’entends bien qu’après avoir accueilli près de 20 millions de tonnes de marchandises il y a plus de 20 ans, nous n’en sommes plus qu’à 4 millions sur la voie historique. Mais aujourd’hui seuls ceux qui n’habitent pas au bord de la voie ferrée pensent encore que l’on peut à nouveau atteindre 20 millions de tonnes.
Notre responsabilité est d’anticiper et d’encourager un transport fret qui se fasse dans des conditions de sécurité optimales et de préservation du cadre de vie des riverains tout en s’assurant de sa capacité. Cela, seul le Lyon Turin le propose aujourd’hui. 


Une meilleure desserte des territoires, un enjeu majeur.

Le désenclavement, c’est œuvrer pour la mobilité durable des voyageurs. Car, au-delà du report modal fret, le projet l’amélioration des désertes voyageurs entre les principales agglomérations rhônalpines et leurs relations avec les métropoles européennes, en diminuant les temps de parcours, en assurant une meilleure régularité et en augmentant le niveau de service.

Concrètement, le Lyon-Turin, c’est un objectif de 4 millions de voyageurs internationaux par an et de 8,7 millions d’usagers nationaux par an. Le trajet entre les deux villes se fera en 1h45, contre plus de 4h aujourd’hui et Paris se trouvera désormais à 4h de Milan, au lieu de 7h actuellement. L’enjeu est bien là, on ne parle pas de quelques minutes grappillées sur un voyage voyageur mais bien de diviser par deux le temps de trajet sur des distance de 400 km pour la premiere et 900 pour la seconde.

Investir pour la croissance et la compétitivité

Le Lyon-Turin est souvent appréhendé au regard de ses retombées économiques. Il est vrai que le projet facilitera considérablement les relations entre la France, particulièrement Rhône-Alpes, et l’Italie. C’est une composante importante du projet. Sur ce point, la réponse apportée à Guillaume LISSY tout à l’heure par les représentants de la Conférence intergouvernementale est significative.

 Au-delà de l’impact de long terme, je souhaite préciser qu’il ne faut pas militer pour le Lyon-Turin en se focalisant uniquement sur les retombées immédiates du chantier. Il ne faut pas se dire, comme j’en entends certains : il nous faut le grand chantier pour résoudre les problèmes d’emploi dans telle ou telle autre partie de la Savoie ou de l’Isère. Il n’empêche, qu’en tant qu’élus locaux, nous devons profiter de toutes les opportunités offertes par un tel chantier et valoriser au mieux l’activité qui en découlera.  Car, il y aura de l’activité, je ne vais pas rentrer dans une querelle de chiffres, mais pour l’avoir vécu sur les chantiers des descenderies, St Martin la Porte, La Praz et Villarodin le Bourget, nous savons que ce genre de chantier, s’installant dans la durée, est pourvoyeur de retombées, financières, économiques, fiscales et en terme d’emplois, non négligeables.
Selon les estimations de la Démarche Grand Chantier Lyon-Turin, ce sont plus de 2 000 emplois qui seront générés sur les 5 plus grosses années de travaux liés au tunnel de base. Les emplois induits seront encore plus importants. Les entreprises locales auront, ne nous voilons pas la face, certaines difficultés à soumissionner sur les lots les plus conséquents, mais par la force des choses, et par leurs fortes implantations locales, elles seront appelées à des missions complémentaires qui leurs permettront de faire vivre une main d’œuvre locale.

Préserver l’environnement

Localement, nous entendons bien certaines inquiétudes sur l’impact que pourrait causer le projet sur l’environnement et les terres agricoles. Je sais, je connais l’impact qu’auront les millions de mètres cubes de marinages sortis des tunnels. Je sais les craintes légitimes face aux tarissements des ressources en eaux, tel que vécu par mes voisins de la commune du Bourget.
Je souhaite toutefois rappeler, comme l’a évoqué Elyette CROSET-BAY, que nous avons vécu, lors de la catastrophe du Mont Blanc, des moments particulièrement pénibles, avec plus de 5000 poids lourds quotidiens au tunnel routier du Fréjus. Que pour rien au monde nous ne souhaitons revivre cet épisode. Et que le report modal du fret routier sur le rail reste l’élément clé de la préservation de la qualité de l’air et de la santé des populations alpines. La préservation de l’environnement et des ressources est au cœur du projet. Je crains bien qu’être réticent aujourd’hui sur le Lyon-Turin, c’est donner du grain à moudre aux techniciens de Bercy qui nous expliqueront qu’il faut aller à saturation des voies existantes, y compris routières, avant de concrétiser la nouvelle liaison. Entre temps, les vallées alpines et leurs habitants risquent bien d’être totalement asphyxiés.



Mes chers collègues, pour conclure, je souhaite vous rappeler que l’ancêtre du tunnel de base, le tunnel ferroviaire du Fréjus, dit aussi du Mont Cenis, à été commencé en 1857 par un Etat de moins de 5 millions d’habitants (plus petit que la Région RA), le Royaume de Piémont Sardaigne, et qu’à l’époque les interrogations portant sur l’opportunité de la réalisation d’un ouvrage titanesque pour l’époque et pour un si peit Etat, se posaient déjà. Les doutes, les inquiétudes, y compris dans les vallées alpines étaient déjà de mise, et il faut ajouter à cela que les fonds européens n’existaient pas. Il a fallu la combativité et la clairvoyance d’une poignée d’hommes d’Etat pour que le tunnel soit creusé au commencement à la pelle et à la pioche. Il nous revient aujourd’hui la charge de mettre en œuvre les conditions de réalisation de cet ouvrage qui doit permettre l’exploitation du service ferroviaire du XXIeme siècle avec toutes les assurances du report modal, de l’exigence environnementale locale et de l’efficacité économique que nous devons à nos concitoyens.

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