06/02/2008

La réponse du Gouvernement concernant l'application de la Carte Judiciaire en Savoie.

Voila une réponse bien décevante, apportée par le ministre des Sports représentant la Garde des Sceaux (cherchez l'erreur), à la question du Sénateur REPENTIN. Lisez jusqu'à la fin, vous verrez qu'en Savoie on ne lâchera pas le morceau...

Carte judiciaire de la Savoie
M. Thierry Repentin. - La réforme de la carte judiciaire en Savoie prévoit de supprimer les tribunaux d'instance de Saint-Jean-de-Maurienne et de Moûtiers. Je tiens à souligner la spécificité géographique du ressort du tribunal de grande instance d'Albertville qui s'étale sur deux vallées, la Maurienne et la Tarentaise, sur un secteur de montagne regroupant deux tiers des domaines skiables de notre pays, à laquelle s'ajoute notamment le contentieux lié au droit des étrangers au point de passage de Modane-Fourneaux, avec l'Italie. La suppression de ces tribunaux d'instance accroîtra considérablement les distances et les temps de trajet des justiciables, souvent parmi les plus défavorisés de nos concitoyens. Les élus de ces territoires, toutes tendances politiques confondues, se sont élevés contre ces suppressions lors d'une manifestation le 12 janvier dernier dans le chef lieu d'arrondissement de Maurienne. La possible création d'une maison de la justice et du droit à Saint-Jean-de-Maurienne ne remplacera pas le tribunal dans ses missions. Dire le contraire serait faire injure aux magistrats et à la population.
En outre, les élus, le Barreau et les fonctionnaires du TGI ne comprennent pas l'absence de création d'un pôle d'instruction à Albertville où le tribunal dispose de cinq parquetiers et de deux juges d'instruction, création justifiée par le grand nombre et la complexité des dossiers ouverts, par la présence de locaux adaptés à ce nouveau service, et par l'activité économique -notamment industrielle et touristique- toujours croissante du ressort. Le tribunal pourrait également être renforcé par l'installation d'un juge pour enfants. En matière pénale, le nombre annuel de procédures s'élève à environ vingt mille.
De même, compte tenu de la géographie montagnarde du ressort d'Albertville, la décision de transférer le contentieux commercial et le registre du commerce et des sociétés d'Albertville vers Chambéry se traduira par un éloignement du service et par des dépenses supplémentaires de déplacement. Des propositions ont été faites afin de maintenir le tribunal du conseil des prud'hommes d'Aix-les-Bains : élargissement du périmètre de la juridiction, fusion, au sein de cette cité, des conseils de prud'hommes d'Aix et de Chambéry.
Je vous demande solennellement de reconsidérer la réforme annoncée en prenant en compte la spécificité du ressort du tribunal d'Albertville, ainsi que celle des territoires de montagne, en l'occurrence la Maurienne et la Tarentaise, avant toute décision définitive qui se traduirait par un délitement du service public de la justice et un accès plus difficile à ce service pour les populations des montagnes et des territoires ruraux en question.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État auprès de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, chargé des sports.
- Je vous confirme que les deux tribunaux d'instance de Moutiers et Saint-Jean-de-Maurienne seront, à compter du 1er janvier 2010, rattachés au tribunal d'instance d'Albertville. En effet, le tribunal d'instance de Saint-Jean-de-Maurienne, juridiction de très faible activité - deux cent cinquante-cinq affaires civiles nouvelles par an en moyenne de 2004 à 2006 pour un niveau moyen d'activité de six cent quinze affaires par an et par magistrat- compte parmi les cent soixante-neuf tribunaux dont l'activité ne justifie pas l'emploi d'un juge à plein temps. Le tribunal d'instance de Moutiers a également une faible activité avec quatre cent soixante-deux affaires civiles nouvelles par an, en moyenne pendant la même période. Dans ces conditions, la continuité du service, l'accueil du justiciable et la sécurité du tribunal ne peuvent être assurés de manière satisfaisante. En outre, la ministre de la justice a souhaité que les tribunaux d'instance représentent désormais une activité suffisante pour deux magistrats, afin de rompre l'isolement du juge. Il n'est pas concevable d'avoir des juges d'instance, souvent nommés à la sortie de l'école nationale de la magistrature, seuls dans leur tribunal, sans possibilité d'échanges avec des magistrats expérimentés. Le ministère a bien évidemment tenu compte des impératifs de l'aménagement du territoire. Le rattachement du ressort des tribunaux de Saint-Jean-de-Maurienne et de Moutiers au tribunal d'instance d'Albertville a tenu compte de son accessibilité pour le justiciable : Moutiers est à moins de trente kilomètres d'Albertville soit un temps de trajet par voie expresse inférieur à trente minutes, et le tribunal d'instance de Saint-Jean-de-Maurienne, à soixante et un kilomètres d'Albertville, est distant de moins d'une heure de trajet par la voie expresse. L'accès à la justice dans le ressort du tribunal de grande instance d'Albertville n'est donc pas compromis pour le justiciable.
Par ailleurs, l'avis relatif aux conseils de prud'hommes, publié au Journal officiel du 22 novembre dernier, ne fait pas état de modifications pour le département de la Savoie. Les conseils d'Albertville, d'Aix-les-Bains et de Chambéry ne sont donc pas susceptibles d'être regroupés.
La compétence commerciale de vingt-trois tribunaux de grande instance sera transférée, à compter du 1er janvier 2009, aux tribunaux de commerce, et le tribunal de commerce de Chambéry deviendra compétent pour le ressort du tribunal de grande instance d'Albertville.
La loi du 5 mars 2007 tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale, prévoit qu'à compter du 1er janvier 2010, toutes les affaires d'instruction seront confiées à un collège composé de trois juges d'instruction. La localisation des pôles de l'instruction a donc pris en compte la mise en oeuvre de la collégialité à partir de 2010. Dans le département de la Savoie, le tribunal de grande instance d'Albertville connaît, en matière d'instruction, une activité inférieure à celle de Chambéry : le nombre d'ouvertures d'informations a été en moyenne, entre 2004 et 2006, de soixante dossiers nouveaux par an et par juge d'instruction, ce qui représente un temps plein de 1,67 juge d'instruction. Il a donc été décidé de localiser le pôle de l'instruction au tribunal de grande instance de Chambéry dont l'activité en matière d'instruction représente un temps plein de 1,72 juge d'instruction. Néanmoins, jusqu'au 1er janvier 2010, les affaires ne relevant pas de la compétence du pôle de l'instruction demeureront instruites par le juge d'instruction du tribunal de grande instance d'Albertville. Et le tribunal correctionnel d'Albertville reste compétent pour les affaires qui seront instruites par le pôle de l'instruction de Chambéry.
Enfin, la nécessité de créer un poste de juge des enfants à Albertville n'a pas été présentée au ministère par les responsables de juridictions.
Une commission présidée par le secrétaire général du ministère et l'inspecteur général des services judiciaires est chargée de faire au garde des Sceaux des propositions quant à l'évolution des maisons de la justice et du droit. C'est dans ce cadre que vos préoccupations en matière d'organisation judiciaire pour le ressort d'Albertville semblent devoir désormais s'inscrire.

M. Thierry Repentin. - Je tiens à dire ma complète déception quant à l'attitude de la garde des Sceaux qui n'est pas venue annoncer elle-même ses décisions dans nos départements puisqu'elle a cru bon de s'arrêter à Lyon ! Elle est plus disponible pour tel ou tel rendez-vous mondain, un défilé de John Galliano par exemple, que pour rencontrer les élus ou pour répondre à un parlementaire...
Sur le fond, elle botte en touche. Mais le ballon finit toujours par revenir sur le terrain, celui de la justice.
A partir de 2010, dans notre pays, pour aller au tribunal il faudra soit deux stations de métro, soit deux heures de trajet. C'est inacceptable !


source : compte-rendu intégral des Questions au gouvernement, Sénat.

Aucun commentaire: